Réforme des collectivités territoriales: des objectifs inavouables?

Publié le par Serge

Dans les prochaines semaines, le Sénat et l'Assemblée Nationale vont se saisir du projet présidentiel de réforme des collectivités territoriales.

 

Quatre textes seront soumis aux votes de la représentation nationale:

 

-          Un projet de loi de réforme des collectivités territoriales, qui sera discuté au Sénat à partir du 15 décembre.

-          Un projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseillers généraux et régionaux (mars 2014, date de l'élection des conseillers territoriaux).

-          Un projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale, qui comporte des dispositions sur le statut de l'élu.

-          Un projet de loi organique portant sur l'élection des membres des conseils des collectivités territoriales et des EPCI. (Etablissements publics de coopération intercommunale)

 

Faut-il simplifier et rationaliser notre organisation administrative territoriale (36 789 communes, 101 départements, 26 régions et 15 900 syndicats intercommunaux)? Oui, bien naturellement.

Faut-il clarifier le partage des compétences entre les niveaux d’administration? Oui, bien sûr.

Faut-il profiter de cette réforme pour ajouter un peu plus de complexité en créant une nouvelle structure pour les zones urbaines atteignant 500 000 habitants, la "métropole"? Certainement pas.

 

Cette incohérence d'objectifs est révélatrice (disparition des  départements, renoncement à une politique volontariste d'aménagement du territoire) d'un dessein caché qui réalise la coupure entre les centres de décisions et le citoyen.

 

Un malaise renforcé par les modalités d'élection proposée pour les conseillers territoriaux:

le scrutin uninominal à un tour sur une base cantonale pour 80 % d'entre eux et pour les 20 % restant un scrutin proportionnel de liste au plus fort reste au niveau du département (dont on souhaite par ailleurs la disparition) à partir du total des suffrages des candidats non élus (encore faut-il avoir fait plus de 5% des voix).

 

Un système électoral bien complexe qui permet d'être élu en étant largement minoritaire.

Un système électoral inégalitaire puisque tous les suffrages ne comptent pas : sont perdus les suffrages des partis ayant présenté des candidats dans moins de la moitié des cantons ainsi que ceux obtenant pour le scrutin de liste (total des suffrages des candidats non élus) moins de 5% au niveau départemental.

Un système électoral jamais utilisé dans l'histoire de la France qui porte atteinte au pluralisme politique et qui instaure de fait un bipartisme anglo-saxon.

 

Un malaise conforté quand on sait  que le Président et son gouvernement veut réduire le nombre de cantons à environ 2400, contre un peu plus de 4000 aujourd’hui et quand on découvre que le nouveau découpage rendu nécessaire serait effectué par ordonnance, c’est-à-dire sans aucun contrôle parlementaire.

 

Non, cette réforme des collectivités territoriales ne peut pas se faire contre l'avis majoritairement négatif des représentants élus des conseils municipaux, des conseils généraux et régionaux.

 

Non, cette réforme ne peut pas se faire en minorant le vote citoyen.

 

Non, cette réforme ne peut pas se faire en bafouant la République.

 

 

Un homme ne se mêlant pas de politique mérite de passer, non pour un citoyen paisible, mais pour un citoyen inutile.  [Thucydide]

 

 

 

Publié dans Idées: Comprendre

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